samedi, janvier 14

Des homosexuels peuvent-ils être prêtres ? (1ère partie)

Dans son numéro 2349 de janvier, la Documentation Catholique propose un dossier de 16 pages intitulé "homosexualité et ministère ordonné". Outre le texte intégral de la récente Instruction du Vatican sur les homosexuels candidats à la prêtrise, on y trouve un commentaire du malheureusement incontournable Tony Anatrella, une déclaration de la Conférence des évêques suisses, un communiqué de Mgr William S.Skystad (président de la Conférence épiscopale des Etats-Unis) et une prise de position du cardinal Karl Lehman (président de la Conférence épiscopale allemande.
Mais ce qui m'a le plus intéressé c'est le texte du Père Timothy Radcliffe, intitulé "Des homosexuels peuvent-ils être prêtres",dont le texte original était paru dans The Tablet du 26 novembre 2005. Timothy Radcliffe fut Maître de l'Ordre des Prêcheurs (dominicains) de 1992 à 2001. C'est dire si son avis compte. Il est aussi l'auteur du récent "Pourquoi donc être chrétien", que je vous recommande, et du best-seller "Je vous appelle amis".

En préambule, Timothy Radcliffe dit vouloir "donner une interprétation aussi positive que possible" du texte du Vatican.
Suit un paragraphe sur la vocation très touchant:
La vocation est un appel de Dieu. Il est vrai, comme le dit le document, qu'elle est reçue "par l'intermédiaire de l'Eglise, dans l'Eglise et pour le service de l'Eglise", mais c'est Dieu qui appelle. Ayant collaboré avec des évêques et des prêtres, diocésains et religieux, dans le monde entier, je n'ai aucun doute sur le fait que Dieu appelle des homosexuels au sacerdoce, et ils sont parmi les prêtres les plus dévoués et les plus impressionnants que j'ai connus. Par conséquent, aucun prêtre convaincu de sa vocation ne doit lire dans ce document une raison de se ranger dans une catégorie inférieure. Et on peut bien supposer que Dieu continuera à appeler au sacerdoce aussi bien des homosexuels que des hétérosexuels, parce que l'Eglise a besoin des dons de chacun d'eux.

Timothy Radcliffe s'interroge ensuite sur le sens de l'expression "tendance homosexuelle profondément enracinée" qui est l'un des cas empêchant un candidat d'accéder à la prêtrise. Là encore, ses propos sont émouvants:
On peut aussi interpréter l'affirmation comme faisant allusion à une orientation homosexuelle permanente. Mais ce ne peut être le cas, puisque, comme je l'ai dit, il y a d'excellents prêtres qui sont des gays et qui ont clairement une vocation reçue de Dieu. Peut-être est-il plus exact de la comprendre en référence à un epersonne dont l'orientation est si centrale à la perception qu'il a de lui-même qu'elle en devient une obsession et domine son imagination. A n'en pas douter, cela poserait la question de savoir s'il serait capable de mener de façon satisfaisante une vie de prêtre engagé dans le célibat. Mais tout hétérosexuel pareillement centré sur sa sexualité aurait aussi des problèmes. Ce qui importe c'est la maturité sexuelle plutôt que l'orientation.

Timothy Radcliffe critique aussi la notion de culture gay. Certes, il pense que "les séminaristes et prêtres n'ont pas à aller dans les lieux gays, et que les séminaristes n'ont pas à développer une culture gay". Mais il précise aussitôt que "toute forme de sous-culture sexuelle, homoe ou hétéro, serait la ruine de leur célibat. Une sous-culture macho serait tout aussi inappropriée. "

T.Radcliffe prend ensuite position contre l'oppression dont les gays sont victimes:
"L'Eglise soit s'opposer à la "discrimination injuste" à l'égard des homosexuels, comme elle le fait à l'égard de la discrimination raciale. Cela signifie que tous les prêtres doivent être préparés à se ranger du côté des gays quand ceux-ci sont victimes de l'oppression, et à être vus de ce côté-là. Bien sûr cela soulève des questions complexes. S'opposer au amariage gay sera considéré par certains comme de la discrimination, alors que dans l'enseignement officiel catholique ce ne l'est pas. A s'engager dans une opposition à la discrimination, on prend le risque d'être incompris. C'est un risque qu'il faut parfois prendre".

J'évoquerai la suite des propos de Timothy Radcliff dans un prochain post. En tout cas, ça m'a réjoui de le lire, même s'il doit être bien isolé dans l'Eglise catholique romaine.
Et vous, qu'en pensez-vous ?

9 commentaires:

Cairo The Boxer a dit…

bonjur. Woof woof.

Anonyme a dit…

Timothy, isolé? peut-être pas tant que cela...je suis plutôt d'accord avec ce qu'il dit dans cet extrait. Et puis pour les cathos-homos dont je suis, heureusement qu'il y a des gens comme lui pour remettre un certain document et un certain monseigneur à leur place, pour ne jamais séparer foi, dogme et amour du prochain, le tout dans une ouverture permanente à l'Esprit-Saint.
Pour moi qui fréquente particulièrement les dominicains en ce moment, je loue le Seigneur pour cet ordre qui nous donne une grande bouffée d'oxygène.

Anonyme a dit…

Ce cher Timothy Radcliff doit se sentir bien seul dans l'eglise...

Ichtus75000 a dit…

Le frère Timothy Radcliffe n'est pas si isolé : je rentre d'un colloque sur les Chrétiens et la sexualité au temps du sida où il est intervenu en faisant une conférence sur "Sexualité et eucharistie" (remarquable). Il y avait environ 150 personnes dans la salle : tous ont applaudi. Et ce qu'il a dit ce démarquait nettement de la loi naturelle prônée par l'Eglise catholique. Il a même invité cette Eglise a écouté maintenant ce que les homosexuels vivent dans l'Eglise pour pouvoir fonder vraiment un discours sur l'autorité de l'expérience (ce que les gens vivent) et pas seulement sur l'autorité de la raison, de la tradition et de la hiérarchie.
Sera-t-il entendu un jour ? Nul n'est prophète en son pays...
Ichtus.

Ichtus75000 a dit…

Suite à mon précédent message, j'ajoute que j'ai essayé de faire un résumé de la conférence de Timothy Rdacliffe sur mon blog. pour ceux que ça intéresserait, en attendant l'édition officielle des actes du colloque.
Ichtus.

P.-S. pour Jean-Marc : j'ai vu que tu étais inscrit à ce colloque mais ne t'ai pas trouvé.

Jean-Marc a dit…

J'avais prévu d'aller à ce colloque mais mon emploi du temps m'en a malheureusement empêché. Quelqu'un aurait-il pris des notes ou, mieux, enregistrer les conférences ?

Anonyme a dit…

J'étais aussi à ce colloque "Chrétiens Sida", des choses très fortes ont été dites par Lyta Basset et Timothy Radcliffe.
Universelles, pour tous les chrétiens, des choses comme "suspendre le jugement", ou "être libre d'une liberté inimaginable", ou "nous sommes tous seuls devant Dieu (L Basset)".

Pour Timothy Radcliffe, Dieu ne s'intéresse pas au règles, (Tout le monde demande à l'Eglise de produire des règles et tout le monde se plaint après que c'est mal fait...),

Mais à la liberté et à la responsabilité , je retiens trois choses de son exposé :
- le don, la liberté, l'engagement

nous communiquons aussi par le corps, si nous étions des purs esprits nous nous comprendrions tout de suite

Une limitation, un regret, c'est que la question des limitations liées au SIDA n'ait pas été abordée... Le "don de soi total est il possible en des temps de maladie".

De quoi faire réfléchir en somme... Ou d'ouvrir un autre débat sur "Oser s'affirmer et poser des limites"..

Quand à la question théologique, il se réfère à la Tradition Catholique dans laquelle la théologie se base sur trois piliers :
- l'écoute des écritures et de la tradition ancienne.
- l'écoute de la raison
- l'écoute de l'expérience sensible.
C'est la théologie du Cardinal Newman et c'est profondément thomiste.

En théologie, aussi, il est question de la responsabilité que l'on prend en choisissant de professer telle ou telle valeur ou croyance...

Anonyme a dit…

Homos prêtres ?

Ceux qui ont abusé sexuellement de millers d'enfants dans les orphelinats et les Eglises (en Amerique du Sud) ils sont quoi alors ?

Bernard a dit…

Je suis heureux de voir que le colloque "Les Chrétiens et le sexualité au temps du sida" a apporté un souffle d'air frais.
(Avis à Ichtus 75000 : les actes sont parus au éditions du Cerf.)

Au tout début de l'associaiton Chrétiens & sida Antoine Lion faisiat part de la rage et de la foi qui nous habite
Rage de voir que beaucoup de ceux qui sont atteints n'ont pas seulement à faire faire à un mal sournois, mais a des formes d'exclusion que l'on croyait abolies dans notre société;
Rage devant le silence voire la complicité de certaines autorités de certains hommes d'Eglise. Rage de savoir que nombre de ceux qui, au coeur de l'épreuve ont cherché un soutien matériel, morale spirtuel et ne l'ont pas trouvé ; et de cette peur irrationelle qui elle, à la différence du sida est contagieuse.
Rage de ceux qui jugent avec hauteur les hommes parce qu'ils aiment les hommes ou qu'ils utilisent des drogues et devant ces raideurs qui bloquent d'indispensables actions de préventio.

La foi aussi : celle qui s'émerveille devant tant de ressources humaines libérées dans l'épruve du sida; Devant la générosité de tant de volontaires, de soignants et d'autres professionnels, de tant de ceux qui croient au ciel et de ceux qui n'y croient pas...
Foi qui tient que nulle tendresse n'est vaine, que nul amour n'est perdu car "l'Amour est fort comme la mort" dit le Cantique des cantiques.Foi en un dieu qui sauve, qui ne lache aucune excistence, qui demeure mystérieusement infiniment présent dans toute souffrance, celle du sida comme toute autre.

Un Dieu qui souffre lui aussi - qui a souffert sur la croix -de cequi nous met en rage; Et qui se réjouit d'une allégresse sans mesure, de ce meilleur dont l'Homme est aussi capable.

La rage, la foi et l'espérance. C'est dans ce creuset qu'est né Chrétiens & sida il y a 16 ans maintenant.

La rage, la foi et l'espérance qui nous font vivre aujourd'hui.